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Changements climatiques

Faire face aux crises alimentaires et nutritionnelles récurrentes en Afrique de l’Ouest

L’Afrique de l’Ouest est confrontée aux défis récurrents des crises alimentaires et nutritionnelles, aggravés par les conflits armés et intercommunautaires et les impacts des changements climatiques auxquels s’est ajoutée, depuis février 2020, la pandémie du coronavirus (Covid-19) et plus récemment les conséquences alimentaires et non alimentaires du conflit armé en Ukraine. Ces crises affectent tous les secteurs et perturbent les systèmes alimentaires de la région.

Malgré les nombreux efforts consentis par les Etats et les partenaires au développement, la situation alimentaire et nutritionnelle de la région reste globalement préoccupante surtout au Sahel où l’insécurité alimentaire touche des millions de personnes. La situation se détériore d’année en année. En effet, si le dispositif régional de Prévention et de gestion des crises alimentaires (Pregec) dénombrait près de 10,7 millions de personnes en insécurité alimentaire et nutritionnelle pour la période de juin à août 2019 dans l’espace Sahel et Afrique de l’Ouest, les statistiques de mars 2022 alertent déjà sur une augmentation sans précédent dans la région, atteignant 38,3 millions de personnes en insécurité alimentaire et nutritionnelle au cours de la prochaine période de soudure y compris les déplacés internes.

Afin d’accompagner les efforts des pays dont les budgets sont fortement sollicités par la réponse à la crise sanitaire et sécuritaire, la Cedeao s’est fortement mobilisée pour apporter une assistance humanitaire aux populations vulnérables les plus touchées de ses Etats membres. Cette assistance humanitaire se manifeste essentiellement à travers des mises à dispositions de stocks de la Réserve régionale de sécurité alimentaire (RRSA) ou des dons de produits alimentaires et nutritionnels. La RRSA constitue la troisième ligne de défense pour prévenir et gérer les crises alimentaires en Afrique de l’Ouest. C’est un dispositif de solidarité régionale complémentaire des stocks de proximité (première ligne de défense au niveau des villages et des communautés) et des stocks nationaux de sécurité alimentaire (deuxième ligne de défense) détenus par les Etats.

Face à la pandémie à coronavirus, la Commission de la Cedeao et l’Union européenne ont apporté, entre 2020 et 2021, des appuis en produits alimentaires et nutritionnels aux populations vulnérables au Burkina Faso, au Mali, au Niger et au Nigeria. Le volume total de cette assistance est de 21190 tonnes de céréales composées de mil, maïs, riz et sorgho réparties comme suit : Burkina Faso (954 tonnes), Mali (8 165 tonnes), Niger (8 072 tonnes plus 205 tonnes de produits nutritionnels), Nigeria (3 999 tonnes). Toutefois, en cumulant les 12 interventions de la Réserve régionale de la Cedeao entre 2017 et 2021 auprès des Etats membres demandeurs, on aboutit à un total de 40 315, 45 tonnes de céréales plus 205 tonnes de produits nutritionnels mis à la disposition des Etats membres. Ces stocks ont été utilisés à travers un ou plusieurs instruments de filets sociaux selon les pays bénéficiaires, notamment des ventes à prix subventionnés, des distributions gratuites de céréales auprès des populations vulnérables et des déplacés internes et la distribution de farines enrichies auprès des enfants de moins de 5 ans.

La situation alimentaire et nutritionnelle de cette année est exceptionnelle. Les prix des produits agricoles sont en hausse en moyenne de 33 à 37% par rapport à la moyenne quinquennale avec des augmentations pouvant aller jusqu’à plus de 50% dans certaines localités. Cette situation déjà préoccupante va être aggravée par les effets des tensions géopolitiques internationales.

récentes, notamment la guerre en Ukraine qui génère : (i) un impact direct sur les prix mondiaux du blé, du maïs mais aussi des engrais dont l’Ukraine et la Russie sont des acteurs majeurs et (ii) l’augmentation du prix du pétrole qui a un impact direct sur le coût du transport international, régional et national de tous les biens et services, entrainant ainsi une inflation généralisée.

Pour y faire face, la Cedeao est entrain de mobiliser tous ses instruments internes (RRSA, fonds d’urgence humanitaire, etc.) ainsi que ses partenaires techniques et financiers. Un plan d’actions spécifique est en cours d’élaboration. Il faut refonder les politiques et les approches d’intervention pour agir désormais par anticipation afin de mieux prévenir les crises alimentaires et nutritionnelles, plutôt que de les gérer.