La mise en place de systèmes de filets sociaux capables de répondre efficacement et à grande échelle à une situation d'urgence est un déterminant essentiel de la lutte contre les effets dévastateurs de la covid-19 sur le bien-être des populations. Dans le cas contraire, la stabilité de la région qui fait déjà face à plusieurs défis, notamment celui de l’insécurité civile, pourrait se fragiliser davantage.

L’apparition de la Covid-19 dans la région et sa rapide propagation a entrainé la prise de mesures sociales tous azimuts par les pays afin de permettre aux populations les plus vulnérables de surmonter la pandémie. En effet, bien que cette pandémie touche l'ensemble des populations, il est évident que certains groupes en subissent plus durement les effets. Dans cette perspective, les filets sociaux de sécurité sont essentiels dans la protection des personnes les plus vulnérables en ce qu’ils constituent un complément de taille des interventions médicales.

Si dans l’ensemble, les actions réactives menées jusque-là par les pays se sont révélées pertinentes, elles sont en revanche en incapacité d’enrayer la décapitalisation des moyens d’existence des ménages vulnérables confrontés à la crise.

Face aux conséquences déjà subies telles que la perte de bétail et des denrées périssables, la perte de revenus, l’incapacité à s’acheter certains produits de base, le risque de famine et de malnutrition, les actions de distribution gratuite ou à coûts réduits d’intrants agricoles aux petits producteurs (semences, engrais, dotation de capitaux productifs, matériels de production, etc.) en cette période hivernale de forte production sont vivement recommandées. Elles ont l’avantage non seulement de préserver et renforcer les moyens de production et de subsistance, mais aussi et surtout de renforcer la résilience des populations vulnérables face à des crises futures.

L’approche qui consiste à fournir de l’aide d’urgence (distribution de vivres, gratuité ou baisse des coûts de certains services de base par exemple) ayant beaucoup de limites du fait de son caractère ponctuel, il est souhaitable d’évoluer vers des instruments de filets sociaux plus réguliers, prévisibles et durables. A ce titre, l’expérience diversifiée de la Cedeao à travers le financement de 19 projets pilotes de filets sociaux mis en œuvre dans les 15 Etats membres a permis d’identifier des types de filets sociaux à mettre à l’échelle pour renforcer les dispositifs de gestion de crise et surtout insérer les ménages vulnérables dans une trajectoire de développement.

Cofinancés par la Coopération espagnole et la Commission de la Cedeao, ces projets dont la mise en œuvre a commencé en 2016 ont permis d’impacter positivement la vie de plus de 53 000 bénéficiaires directs dont 62% de femmes. Les acquis s’expriment en termes de (i) distribution alimentaire, développement de l’enfance et accès aux services sociaux de base, (ii) développement de la source principale de revenus et de la sécurité alimentaire des ménages vulnérables, (iii) renforcement des moyens d’existence et de la capacité des ménages à faire face aux chocs et (iv) développement et expérimentation de méthodes de ciblage. D’autres acquis sont, entre autres, l’autonomisation des femmes et le renforcement de capacités de la plupart des Etats en matière de gestion de programmes de filets sociaux de sécurité en lien avec les stratégies ou politiques nationales de protection sociale.

Les leçons apprises de ces acquis orientent la réflexion vers la promotion de certains instruments de filets sociaux de sécurité tels que (i) les modèles intégrés de cantines scolaires avec approvisionnement en produits locaux et promotion de pratiques d’agroécologie, (ii) la conception de filets sociaux adaptés au contexte pastoral, (iii) les transferts monétaires combinés à des mesures de soutien à la production et (iv) l’appui aux activités génératrices de revenus des femmes et la valorisation de leur rôle dans la sécurité alimentaire et nutritionnelle.